Un autre regard

Un autre regard

PENSER LE CORAN n°4/50

Extraits n°4/50

du livre « Penser le Coran » de Mahmoud Hussein*

Edition : GRASSET – 2009


 NB : J’ai ajouté au texte du livre de Mahmoud Hussein, la traduction en arabe des versets du Coran ainsi que principalement le Tafsir de Jalayn. Il me semble que la compréhension devient plus pertinente pour toutes celles et tous ceux qui manient le français et l'arabe. 

Le livre est en vente en français et traduit à l'arabe

Achetez les livres et lisez et faites lire vos enfants, vos ami(e)s et vos collègues

(Abdelhak RIKI)


CE QUE DIT LE CORAN

ET CE QU’ON LUI FAIT DIRE

(suite)

Au-delà d’une information élémentaire sur la teneur de tel ou tel verset, nous nous efforcions de souligner ce qui, pour nous, était une évidence : que la parole coranique entretient un lien vivant avec le contexte dans lequel elle a été révélée.

Ces tournées nous ont permis de mesurer la difficulté qu’éprouvent de nombreux croyants à admettre un tel discours.

Et de comprendre pourquoi, dans leur for intérieur, ils ne se sentent pas autorisés à l’admettre.

Ce qui les en empêche, c’est une doctrine qui a progressivement pris corps après la mort du Prophète et qui, depuis, n’a cessé de faire ravage dans les esprits. Elle repose sur un raisonnement à première vue imparable : le Coran étant la Parole de Dieu, il n’est pas tributaire du temps. Ses versets ne sont pas liés au contexte où ils ont été révélés. Ils sont formulés, une fois pour toutes, pour embrasser tous les contextes possibles. Aujourd’hui comme hier, ils sont donc à prendre, tels quels, au pied de la lettre. C’est le postulat littéraliste.

Le croyant est alors confronté au syllogisme suivant : est musulman celui qui croit que le Coran est la Parole de Dieu. Celui qui doute de l’imprescriptibilité de tous ses versets doute, nécessairement, du credo selon lequel le Coran est la Parole de Dieu. Il n’est donc pas musulman.

Cette implacable démonstration explique le trouble de tant de croyants, confrontés à des prescriptions coraniques qu’ils préfèrent ne pas voir, forcés de tricher avec leur conscience en s’efforçant d’ «oublier » tel verset, ou en « privilégiant » tel verset par rapport à tel autre, alors qu’ils se croient tenus d’accepter tous les versets, sans exception, comme également imprescriptibles.

C’est ainsi que s’insinuent, au fond de chaque conscience, de secrètes déchirures entre la fidélité au texte et la pression des faits, entre le sens d’une vérité intemporelle et l’expérience vécue du changement et de la relativité, entre la soumission à l’argument d’autorité et l’exercice de la réflexion personnelle.

C’est pour tenter d’échapper à ces dilemmes que certains se réfugient dans l’intégrisme – où ils abdiquent leur liberté de conscience, en échange de certitudes simples, arbitrairement découpées dans le texte coranique ; où ils ne reconnaissent du réel que ce qui semble conforter leur dogme.

 

٭

Le propos des pages qui suivent est de montrer que ces déchirures et ces errements ne découlent pas du Coran, mais sont le fait de l’a priori littéraliste.

Ce dernier plante un décor en trempe l’œil, qui occulte la composante temporelle du Livre, pour ne laisser voir que son origine divine. Or, une lecture sans a priori du Coran fait apparaître que ces deux dimensions sont inséparables. La Parole de Dieu s’est manifestée en se projetant dans un lieu précis, en un moment donné de l’histoire du monde.

Si Dieu destine cette parole à l’humanité dans son ensemble, Il la révèle à un groupe particulier d’humains, les Arabes du VII siècle, qui en sont les premiers dépositaires. Il ne se contente pas, alors, de leur dicter les principes fondateurs de l’islam, Il intervient aussi dans le cours de leur vie terrestre.

Par le truchement de Son Prophète, Il leur adresse un message formulé en leur langue, qui répond directement à leurs espoirs et à leurs interrogations, dont les visées spirituelles s’entrelacent souvent à des propos de circonstance.  La Parole de Dieu se présente ainsi comme indissociable du temps humain où elle s’est inscrite.

Le croyant qui vit cette Parole sous d’autres cieux, en d’autres siècles, ne peut donc pas la prendre au pied de la lettre. Il est au contraire appelé à un effort d’interprétation, pour accorder les enseignements coraniques aux conditions changeantes de la vie. 

 

A SUIVRE.....



17/04/2013
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